Si ma mémoire ne me fait pas défaut, c’est en 2009 qu’Activision a annoncé un certain True Crime Hong Kong signé United Front Games. Début 2011, des rumeurs laissaient à penser que le projet avait été abandonné par Acti, ce qui a été confirmé peu de temps après, l’éditeur évoquant principalement le cadre d’une restructuration. Pourtant, le jeu était bien avancé et les premiers retours faits dans la presse étaient plutôt encourageants. Cela a donc donné une idée à Square Enix qui a décidé de récupérer les droits du soft en août 2011. Quelques mois plus tard, en février 2012, le titre revenait sous le feu des projecteurs avec un nouveau nom : Sleeping Dogs. Reste alors à voir si SE a bien fait de donner une chance à ce projet qui aurait pu ne jamais voir le jour…

Sleeping Dogs - Wouf !

sleeping-dogs1 Après un long séjour aux Etats-Unis, Wei Shen (policier) revient à Hong Kong pour infiltrer la triade des Sun On Yee sur ordre de son chef. Ce retour au pays lui permet de renouer contact avec d’anciennes connaissances, comme Jackie Ma, une petite frappe qui va lui permettre d’intégrer la triade au bas de l’échelle. Bien entendu, les débuts sont synonymes de tâches peu gratifiantes à réaliser pour prouver sa loyauté. Rapidement, on se retrouve immergé dans cet univers, à profiter d’une histoire prenante. Bien qu’elle soit complètement imposée (aucun choix possible pour ouvrir le scénario), elle reste des plus plaisantes à suivre, utilisant les ficelles de grands films traitant du sujet. Il est vrai que certains rebondissements sont assez téléphonés, tandis que d’autres surprennent un poil plus, mais le tout se suit avec un certain plaisir, surtout que les développeurs ont fait un effort sur la mise en scène. Les cinématiques qui ponctuent l’aventure sont même des plus appréciables. Dommage en revanche que de nombreux petits chargements entachent quelque peu les transitions. Grossièrement, l’aventure se divise en deux arcs qui sont entremêlés. Le premier, qui n’est autre que le principal, c’est tout ce qui concerne le policier infiltré, avec tout ce qu’il a à faire pour la triade. Le deuxième, c’est tout simplement un aspect enquête dans lequel Wei Shen est mené à résoudre quatre enquêtes divisées en plusieurs parties.

Court mais intense !

Hélas, ce dernier arc reste clairement en retrait par rapport au reste et les missions qui y sont liées sont assez simplistes. Néanmoins, le tout se mêle plutôt bien dans l’histoire et les scénaristes en ont profité pour bien mettre en avant l’évolution de la psychologie du personnage, tiraillé entre les deux « identités » avec lesquelles il doit jongler. Au niveau des missions, les petits gars de United Front Games ont décidé de faire dans la diversité. Escorte de personnage, filature, course-poursuite, pose de micro, infiltration, racket, personne à débusquer, etc., l’éventail est plutôt riche même s’il n’y a rien de bien original. Au moins, cela a le mérite d’être bien intégré, surtout qu’ils en ont profité pour ajouter des petites séquences faciles d’accès pour varier les plaisirs. Ainsi, on se retrouve à crocheter une serrure, à jouer au mah-jong poker, à faire du karaoké, à régler la sensibilité d’un micro ou encore à pirater un objet électronique en craquant le digicode. C’est simpliste, mais c’est bien intégré et suffisamment bien distillé pour que cela reste un petit moment de détente au cours d’une mission. L’aventure principale pouvant être bouclée en moins d’une huitaine d’heures en allant à l’essentiel, le studio a voulu rallonger celle-ci en offrant des missions secondaires et des objets à trouver. Ainsi, on peut aider certains PNJ en leur rendant service, draguer de jolies demoiselles, voler des camions d’une société, participer à des courses ou à des combats de coq ou encore nettoyer des planques de drogue, avant de pirater une caméra pour faire arrêter le dealer. Moins travaillées que les objectifs principaux, ces missions secondaires sont vraiment à découvrir au long de l’aventure. Vous pouvez bien entendu les faire une fois la trame principale terminée, mais nous vous conseillons de les intégrer à votre progression. Non seulement pour avoir un peu plus de cohérence au niveau de certains dialogues, mais en plus parce que leur relative répétitivité sera moins remarquée comme cela. A tout ceci, il faut ajouter des autels de santé et des coffres secrets à trouver, en plus de douze statues à collecter et à ramener dans un club d’arts martiaux pour apprendre de nouvelles techniques de combat. Au final, la durée de vie est assez variable. Un joueur qui se concentrera sur l’essentiel en intégrant quelques objectifs secondaires pourra voir le générique de fin au bout de dix heures, tandis que celui qui prendra son temps en accomplissant au moins toutes les missions secondaires, en plus des principales, mettra dans les 17 heures. En rajoutant tous les objets à collecter et quelques détours pour profiter des décors, les moins rapides pourront monter jusqu’à 20 à 25 heures de jeu. Cela reste quand même un peu court pour le genre, mais c’est compensé par le prix de vente du jeu, fixé à environ 45 euros, alors que les titres récents sont généralement affichés à 60 ou 70 euros.

Le plein de bonnes idées

On passe rapidement sur les défis liés à l’aspect communautaire (tenir le plus longtemps en wheeling arrière en moto par exemple). Il y a une liste de défis à relever et à partager avec ses amis pour les inciter à battre nos scores. C’est futile, mais les amateurs apprécieront. On en vient alors au système de jeu. On commence avec les combats au corps à corps qui reprennent le système free-flow qui a fait la réputation des derniers Batman ou du dernier Spider-Man. Une touche d’attaque, une pour attraper un ennemi, une pour les contres, il n’en faut pas plus pour obtenir des combats dynamiques aux chorégraphies travaillées. Cela a du punch, c’est spectaculaire et on ne s’en lasse pas, d’autant plus que l’on peut réaliser des combos et en ajouter une douzaine à la panoplie de mouvements en récoltant les statues (comme déjà souligné). Quelques subtilités s’ajoutent au tout pour faire des prises, pour envoyer son adversaire contre un mur ou encore pour sortir un finishing move violent en utilisant l’environnement. Divers objets sont à utiliser pour broyer son vis-à-vis, le brûler, l’électrocuter, lui éclater le crâne, etc. C’est clairement jouissif et on peut même se servir d’armes blanches pour varier les plaisirs. Dommage tout de même que l’I.A. soit si prévisible et si peu intelligente. Les ennemis attaquent uniquement un par un et il est bien facile de prévoir leurs actions. D’une manière générale, le jeu reste assez facile, même pour un joueur moyen.

Par moments, il faut passer à la vitesse supérieure en optant pour les armes à feu. Pistolets, mitraillettes, lance-grenades, voilà quelques uns des joujoux qui permettent de se faire plaisir. Là encore la violence n’est pas censurée et, si les gunfights sont assez basiques (malgré quelques objets à exploser), ils n’en restent pas moins bien intégrés. Ils sont de toute façon plus rares que les combats au corps à corps. Cela dit, il est possible de désarmer un ennemi, de se mettre à couvert, de retirer le viseur (en désactivant l’ATH) ou encore d’allumer les adversaires en profitant d’un effet de slow motion en bondissant d’une couverture ou en glissant sur une table, un muret ou autre. En prime, nous avons même le droit à une partie parkour avec des passages permettant de faire un peu de grimpette, en plus de toutes les actions contextuelles (fort bien intégrées) qui offrent quelques acrobaties spectaculaires. Ces passages sont assez balisés (on retrouve souvent un tissu vert indiquant les endroits que l’on peut escalader), mais cela offre aussi quelques courses-poursuites à pied. Quand il ne marche pas, Wei Shen se transforme en véritable pilote, et ce que ce soit à bord d’une voiture, d’une moto ou même d’un bateau. Dans tous les cas, s’il est armé, il peut sortir son arme à feu pour tirer sur ses ennemis. Le temps ralenti alors pour permettre de viser avec une meilleure précision. On peut tuer le conducteur, faire éclater les pneus ou encore tirer dans le moteur jusqu’à bousiller le véhicule.

En plus de cela, lorsqu’il est en moto (cela fonctionne aussi avec un scooter) ou en voiture (même sentence pour les camions), il peut utiliser une fonction pour prendre le contrôle d’un autre engin motorisé. Pour cela, il suffit de coller au train du véhicule ciblé et d’appuyer sur un bouton lorsqu’on est proche (la possibilité est alors matérialisée par une flèche verte) pour se jeter sur la cible et ainsi en prendre le contrôle. Avec un véhicule à quatre roues, il peut même utiliser une fonction ‘bélier’ pour percuter violemment les autres véhicules par l’arrière ou sur les côtés. Quand il ne fait pas des folies, notre flic infiltré peut tout simplement conduire. Il faut s’habituer à rouler à gauche, mais une fois ceci fait, ce n’est que du plaisir. C’est arcade, c’est maîtrisé malgré quelques soucis de caméra selon les situations, c’est fun et il y a de bonnes sensations. Si la conscience veut que l’on utilise les véhicules de son garage ou que l’on passe en acheter chez le concessionnaire, il est aussi possible d’en voler, quitte à se faire remarquer par les forces de l’ordre, ce qui amène à l’obligation de les semer pour éviter de se faire arrêter. Dans tous les cas, on note que les véhicules achetés sont ajoutés à notre garage (matérialisé par un parking situé près de chacune de nos planques) tandis que ceux qui ont été volés ne peuvent être conservés pour plus tard. Attention tout de même, les développeurs ont intégré un système de réputation qui octroie des niveaux. Ces derniers influent sur les engins que l’on peut acheter, et même sur les vêtements (plusieurs à ajouter à sa garde-robe en plus de ceux débloqués au cours de l’aventure) et autres accessoires.

La magie au-delà de la technique

Au fil des missions, on engrange des XP (triade d’un côté et police de l’autre) qui permettent de débloquer quelques compétences particulières dans chaque domaine. Ainsi, on peut faire appel à un voiturier qui nous livre notre véhicule où que l’on soit, trouver une arme dans chaque coffre d’une voiture de police, augmenter les dégâts de ses attaques, utiliser un objet pour voler une voiture sans déclencher l’alarme et/ou briser une vitre, etc. Là encore, il n’y a rien d’extraordinaire, mais c’est plutôt malin, surtout que pour les XP liés à la police, il faut veiller à préserver le matériel urbain et les innocents pour avoir les meilleurs résultats. Libre à tout un chacun après de maltraiter les passants ou de faire preuve de folie en détruisant des barrières, des feux, voire même des parcmètres dont l’argent nous est alors reversé. En sus, Hong Kong est vraiment réussie. La ville est bien modélisée, elle fourmille de détails et de vie, sans compter les néons qui apportent une ambiance particulière. Entre les quartiers chics, les rues malfamées, le centre ville, les quais, le temple et compagnie, il y a une sacrée variété qui compense la taille relativement modeste de la carte, surtout pour un jeu d’action en monde ouvert. Il est vrai que l’on trouve beaucoup de textures limites, voire dépassées, qu’il y a du clipping et que la qualité des modélisations varie entre certains personnages (tous n’ont pas profité du même soin que Shen) et les objets.

Il y a aussi de l’aliasing, certaines animations s’avèrent bien plus rigides que d’autres et on a pu noter divers bugs de collisions. D’ailleurs, ces soucis semblent légèrement accentués sur cette version PS3, et ce malgré une installation d’une dizaine de minutes et le téléchargement d’un patch 1.01. Néanmoins, cela n’en fait pas un jeu moche pour autant, loin de là même. Entre les détails de Hong Kong, le soin apporté à notre héros dans son ensemble, les effets de lumière réussis, la pluie qui apporte un vrai plus avec son intégration dynamique et le cycle jour/nuit, on arrive rapidement à pardonner les défauts techniques déjà cités. Les développeurs ont fait un gros travail sur l’ambiance, sur la direction artistique, et ces deux aspects sont convaincants. En plus, malgré un développement bien chahuté, on a un jeu qui a un frame-rate relativement stable, ce qui est essentiel dans ce genre de productions. Dans le même esprit, United Front Games a mis un point d’honneur à travailler la bande sonore. Et le moins que l’on puisse dire c’est que le contrat est parfaitement rempli. Les bruitages sont de très bonne facture, les musiques sont plaisantes et la variété est au rendez-vous grâce aux stations radio. Même les doublages sont de bonne qualité, même si on regrette que les discussions en cantonais soient si peu nombreuses, contrairement à l’anglais qui prédomine. Enfin, cela n’entache pas le travail des acteurs vocaux, ni même l’immersion. En revanche, les sous-titres, assez petits au passage, sont assez approximatifs. Cela est même marquant sur certaines traductions d’insultes…

Dernier point, les développeurs ont intégré quelques options que l’on peut désactiver en cours de jeu. Ainsi, on peut se passer des conseils donnés, des aides contextuelles ou encore de l’ATH (indicateurs de tête). Dans le premier cas, on se prive simplement des fenêtres dynamiques (mais pas du son associé…) qui apparaissent pour nous donner la ligne directrice de ce qu’il faut faire. Ce n’est pas gênant de s’en passer puisqu’il reste toujours un indicateur visuel pour marquer le point de passage. Dans le deuxième cas, ce sont les boutons sur lesquels appuyer qui sont masqués. Il faut alors deviner quelle est la bonne touche pour enclencher le script, sans quoi on peut se retrouver à échouer et à recommencer à partir du dernier checkpoint. Dans le troisième cas, cela supprime la mini carte, avec les jauges associées (dont la vie), le viseur lors des gunfights et le téléphone portable qui apparaît en bas à droite de l’écran. S’il est plaisant de ne rien avoir à l’écran pour l’immersion, on regrette que les surbrillances utilisées lors des combats (notamment pour indiquer l’attaque d’un ennemi) restent activées, tandis que le fait de masquer le téléphone portable est tout bonnement handicapant, surtout que l’accessoire n’est pas en permanence à l’écran. En effet, on ne peut pas alors consulter les rapports débloqués, savoir la fonction que l’on utilise ou tout simplement lire les textos que l’on reçoit. En bref, ces options ‘Jeu’ auraient dû être pensées différemment, soit en augmentant le nombre de paramètres individuels, soit en proposant des configurations différentes.

Pour conclure

Sleeping Dogs n’est pas parfait et certains aspects trahissent les soucis liés au développement, comme certains aspects techniques en retrait, une durée de vie un peu juste ou encore une intelligence artificielle bien trop basique pour convaincre. Malgré tout, ce titre de United Front Games est une excellente surprise. Le gameplay est complet, offrant du parkour, des gunfights, de la conduite arcade, des mini-jeux simplistes bien intégrés, plusieurs systèmes d’améliorations, ou encore des combats au corps à corps dynamiques et bien chorégraphiés. Hong Kong a profité d’un soin tout particulier, elle fourmille de détails et de vie, tout en participant fortement à l’ambiance réussie du jeu. L’histoire souffre de quelques rebondissements téléphonés, mais elle n’en reste pas moins intéressante et prenante. Il y a vraiment de quoi se faire plaisir avec ce jeu, surtout qu’il est proposé à un tarif réduit (environ 45 euros au lieu des habituels 60-70 euros). Autant dire que cela permet de compenser certains défauts, à commencer par la durée de vie un peu juste pour le genre. Pour le reste, c’est un véritable régal d’incarner Wei Shen et de retrouver cet univers mélangeant triades, flic infiltré, trahisons, magouilles, rackets et compagnie. On ne peut que remercier Square Enix d’avoir sauvé ce projet qui aurait dû finir à la poubelle à cause d’Activision.
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